La pâquerette

Bellis perennis, Astéracées

Du haut de ses 10 cm, la pâquerette reste discrète, mais pas pour tout le monde! Quel enfant n’a pas cueilli un jour une pâquerette? Je me souviens que j’en faisais des bracelets et des couronnes. Si la rose parle le langage des amoureux, la pâquerette est celui de l’enfance. Cette Belle connue de tous mais sous-estimée cache de nombreux trésors à découvrir. Bonne découverte!

Evolution d’une pâquerette, du bouton à son cône dénudé:

La fasciation, une malformation relativement rare des tissus de la tige:

Description

La pâquerette, de la famille des anciennes composées, les Astéracées, pousse dans les gazons, les prés et les pâturages riches ainsi qu’en bordure de chemin jusqu’à 2400m. Elle se complaît dans les jardins “contusionnés”, tassés, tondus, traumatisés, ce qui signe une de ses utilités médicinales. Petite, mais robuste, elle supporte allégrement les gelées printanières et les 1ères neiges, on peut ainsi la trouver quasi toute l’année. Elle est originaire d’Europe, mais largement naturalisée en Asie et en Amérique.

C’est une petite plante sans tige (c’est un pédoncule, la tige de la fleur), avec des feuilles spatulées (en forme de spatule) et un peu dentées sur les bords et disposées en rosette à la base de la hampe florale. Les capitules floraux sont formés d’une couronne de fleurs ligulées (languettes) blanches femelles stériles, souvent rosées sur le sommet de la face inférieure et d’un coeur de fleurs jaunes tubulées (tube) bisexuées. Le fruit est en forme de graine de sésame ne dépassant pas 1mm. Il n’a pas comme de nombreuses autres astéracées d’aigrette qui est disséminée par le vent. La nuit ou quand il pleut, la pâquerette s’incline et se ferme pour se protéger et le jour elle suit le soleil.

Composants

Des saponines, des flavonoïdes (isorhamnétine, kaempférol), de l’inuline, des mucilages, des substances amères, des tanins, des acides organiques (malique, vinique, acétique et oxalique), des manthocyanes, de l’huile essentielle. Elle contient les mêmes polyines que l’arnica. Elle est riche en potassium, calcium, magnésium, vitamines A et C (même quantité que dans un citron!), 2% de protéines, glucides, carotène.

Propriétés médicinales

La pâquerette est passée à peu près inaperçue des médecins de l’Antiquité et du Moyen Age, Pline est quasi le seul à la nommer sans en dire grand-chose. C’est au 15 et 16ème siècles qu’elle s’est fait une place, utilisée contre toutes sortes de maux. Puis une ordonnance allemande de 1793 a prescrit sa destruction complète pour être passée pour abortive, conception aujourd’hui disparue. Aujourd’hui elle est peu utilisée, plutôt familialement, on ne la retrouve ainsi pas dans les grands livres de phytothérapie et elle a été rayée du Codex.

La pâquerette est un grand remède des enfants, elle mêle toujours à ses actions douceur et efficacité; pour l’acné du nourrisson, on peut en faire des lavages et lotions (ses saponines sesquiterpènes contribuent à la cicatrisation sans trace, à la formation de nouvelles cellules de la peau et au métabolisme pendant les périodes de transition hormonale). Pour les enfants atteints de dermatite atopique, les lavages de la peau permettent d’atténuer les démangeaisons (infusion de pâquerettes en compresse et en interne). Le gel de pâquerette se montre efficace en cas de problème important d’acné chez les jeunes filles (avec règles douloureuses). En compresse, elle est aussi utile sur les coups et ecchymoses, elle est ainsi considérée comme l’arnica des plaines. Au vu de sa douceur, elle est toute indiquée aussi dans les constipations enfantines. Elle était autrefois réputée comme bonne reconstituante et administrée en tisane aux enfants chétifs. Mais elle est également utile chez les adultes, en cas de claquages, entorses, contusions ou hématomes et que la blessure s’accompagne d’une sensation de froid, grâce à son action antihémorragique, antiinflammatoire et sédative, comme celle de l’arnica. Elle aurait encore des vertus anti-allergiques et antimicrobiennes1, tonique, dépurative (peau, reins, poumons et intestins) et expectorante. À l’image de son rôle écologique, elle permettrait également de réguler les déséquilibres du calcium dans le corps tels que les nodules calciques, l’arthrose, la décalcification, l’artériosclérose, etc2.

En médecine chinoise, elles sont réputées comme stimulantes du foie en remède contre la toux, les maladies de peau douloureuses (eczéma, psoriasis…), les maux de tête, l’hypertension, les étourdissements et l’insomnie, ainsi qu’en l’absence de menstruations, un ensemble de symptômes pouvant être attribués à un syndrome de blocage de l’élément Bois en Médecine Traditionnelle Chinoise.

Elle n’aurait aucune contre-indication.

Galénique

En tisane: pour une action sur le transit, 2 à 3 tasses dans la journée. En mélange contre les refroidissements ou en cure dépurative. En externe, compresses, cf propriétés.

En cataplasme: les fleurs pillées à poser sur un coup, bosse, entorse ou encore une ulcération.

En teinture-mère: c’est l’essence de l’intouchabilité, de l’intégrité et de la candeur. Elle symbolise le maintien de l’innocence enfantine et de la pureté. Elle est d’une grande aide dans les blessures psychiques et physiques occasionnées par l’emploi d’une force déchaînée, notamment en cas d’abus sexuels, pour les blessures avec un sentiment d’avoir subi un tort ou fait subi un tort à son corps comme un claquage musculaire en le forçant3. Pour désinfecter les plaies et les blessures, améliorer les ecchymoses des parties molles.

En sirop: à ajouter aux tisanes en cas de refroidissement.

En macérât huileux: l’huile est à utiliser sur les bosses et les ecchymoses, surtout sur les coups portés aux parties molles ainsi que sur le buste (action sur le long terme). L’huile est cicatrisante sur les petites blessures. On peut l’associer à l’arnica pour les chocs, le souci pour les petites blessures, le millepertuis pour la cicatrisation et le forsythia pour le buste. Idéale aussi après un accouchement.

En élixir floral: il aide à synthétiser les informations et à les intégrer dans une perspective globale, il équilibre les 2 cerveaux et s’adresse donc aux personnes qui collectent des informations diverses et variées et qui ont des difficultés à les intégrer dans un ensemble complet et cohérent. Un élixir idéal pour ceux qui doivent organiser ou planifier un projet, prendre du recul, avoir une vue d’ensemble qui ne soit pas au ras des pâquerettes.

En vin: selon Cazin4, 2 poignées de fleurs fraîches infusées dans 1 litre de vin blanc pendant 15 jours constitue un remède contre les migraines dues à un choc ou une commotion, 1 verre le matin.

Histoires et traditions

Elle devrait son nom à ses fleurs qui fleurissent à partir de Pâques ou du vieux français, pasquier, signifiant pâturage. Belle et vivace-Bellis perennis-, elle a été chantée par des poètes et représentée dans de nombreuses tapisseries du Moyen Age et de la Renaissance.

Une légende raconte que la pâquerette est née des larmes versées par Marie Madeleine quand elle ne trouva pas Jésus dans son tombeau au jour de sa résurrection. Ou selon une croyance populaire, à l’origine les pâquerettes étaient complètement blanches. Le jour de la naissance de Jésus, un petit berger qui ne possédait rien, l’offrit au fils de Marie qui le baisa du bout des lèvres. C’est depuis ce jour que le cœur de la fleur est jaune d’or et que le bord est marqué de rose à l’endroit du baiser. Une autre légende veut qu’un jour l’enfant Jésus se piqua avec une épine, et son sang coula. Pour le consoler sa mère lui cueillit une pâquerette. Une goutte de sang coula sur la corolle et c’est depuis cette époque que les pétales de cette fleur sont teintés de rose.

Les pâquerettes survivant très bien aux tontes répétées même très rases dans un gazon, où elles sont particulièrement visibles, elles ont donné lieu à l’expression « au ras des pâquerettes » signifiant « au ras du sol » et, métaphoriquement, « sans intelligence ».

En cuisine

Parties utilisées: feuilles et capitules (fleurs).

Les feuilles sont tendres et croquantes, légèrement aromatiques, les fleurs un peu poivrées. On peut les consommer crues ou cuites. C’est un bon légume cuit. Les boutons floraux peuvent être mis au vinaigre. Les jeunes feuilles sont comestibles en salade et les plus âgées cuites. Les graines peuvent également se consommer, si vous avez la patience de les cueillir. Les fleurs parsemées sur une soupe lors du service s’ouvriront, effet surprise garanti!

Dans certaines régions d’Italie, les rosettes s’ajoutent aux potages ou aux farces des foccacia.

Recettes, idées:

Bibliographie

  • Bisseger et Siffert, La cuisine des plantes sauvages, 2022, ulmer
  • Bonnet, La signature des plantes, 2020, le courrier du livre
  • Couplan, Plantes sauvages comestibles, 2018, Larousse
  • Couplan, Déguster les plantes sauvages, 2017, Sang de la Terre
  • Deroide, Les élixirs floraux, 2017, Deva éditions
  • Exelmans, Cueillette sauvage, 2018, Mango
  • Fleischhauer, Guthmann et Spiegelberger, Plantes sauvages comestibles, 2012, ulmer
  • Fleischhauer et Sussmuth, Plantes sauvages médicinales, 2021, ulmer
  • Fournier, Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France, 2010, omnibus
  • Geers et Degorce, Je cuisine les fleurs, 2016, terre vivante
  • Kalbermatten R et H, Teintures mères végétales, 2017, ATVerlag
  • Lanska, Plantes sauvages comestibles, 1992, Gründ
  • Lieutaghi, La plante compagne, 1991
  • Luu, Les huiles de fleurs solarisées, 2013, Dangles
  • Losch,Dr, Les plantes médicinales, 1906, Bienne ernst kuhn éditeur
  • Nicod et Lonchampt, Cueillir et cuisiner les plante sauvages du Massif jurassien, 2012, Belvédère
  • Thévenin, les plantes sauvages, 2012, Lucien Souny

Notes

1 Fleischhauer et Sussmuth, Pantes sauvages médicinales, 2021, Ulmer

2 Selon Wikipedia, pâquerette

3 Selon Kalbermatten, Teintures-mères végétales, 2017, ATVerlag

4 Dans Thévenin, les plantes sauvages, 2012, Lucien Souny

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